Séminaire – La Reconstruction : Darwin et l’eugénisme : la question du hasard et du progrès dans la sélection naturelle
Darwin et l’eugénisme : la question du hasard et du progrès dans la sélection naturelle
Charles Lenay
Professeur, Université de technologie de Compiègne
Mardi 11 mars, 18h-19h15
en ligne, lien accessible à tous :
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Darwin partageait vraisemblablement les préjugés racistes de son époque et dans son livre sur l’origine de l’homme il se faisait écho des idées eugénistes de William Rathbone Greg et de son cousin Francis Galton. Pourtant il s’opposait fermement à l’emploi de la théorie de la sélection naturelle pour justifier une politique eugéniste ou l’application des principes de la lutte pour l’existence dans le cadre social. Ceci pour deux raisons. D’une part, plutôt que d’aller contre l’altruisme, il fallait comprendre l’origine de la sympathie chez les animaux sociaux et son développement particulier dans le cas de l’espèce humaine. D’autre part, il s’opposait à l’idée d’un progrès orienté dans la transformation et la différenciation des espèces. Une telle opposition allait clairement à contre-courant de toute l’idéologie de l’Angleterre victorienne. Par prudence, pour éviter les conflits qu’il détestait et pour faciliter la diffusion de sa théorie, Darwin laissa s’exprimer en son nom des interprétations de son travail, comme celle d’Herbert Spencer, qu’il désapprouvait en fait. Pour comprendre, cette position paradoxale qui plaçait Darwin contre son époque, il faut revenir à la genèse de sa théorie de l’origine et de l’adaptation des espèces.
En effet, la construction puis la défense de la théorie de la sélection naturelle l’obligeait à accorder un rôle fondamental au hasard : les variations héréditaires doivent se produire au hasard relativement aux conditions de sélection, sinon, on reviendrait soit au lamarkisme, soit à une évolution comme développement prédéterminé de la nature. Un tel hasard était difficile à justifier avant le développement des théories de l’hérédité qui à partir des travaux de Weismann donneront naissance au « néo-darwinisme ». Ces théories établiront une différence ontologique hiérarchique entre germen et soma, entre causalité de l’hérédité et causalité de la sélection. Au contraire, pour Darwin, il était essentiel de défendre non seulement, que les variations se produisent en tous sens, indépendamment des conditions de sélection, mais aussi, en même temps, que certaines variations puissent redéfinir les conditions de sélection et ainsi découvrir de nouvelles places dans l’économie de la nature. Le hasard des variations relativement à la sélection se généralisait donc en une absence de direction dans la transformation et la différenciation des espèces. Ce hasard est précisément ce qui rendait impossible toute récupération créationniste de l’évolution. Mais cela posait aussi problème pour une application eugéniste de la sélection dans l’espèce humaine. Sur quelle base scientifique s’appuyer pour dire la « bonne » direction de l’évolution que l’on voudrait promouvoir contre les perturbations que représenteraient les mesures sociales ?
La solution statistique proposée par les eugénistes depuis Francis Galton jusque Ronald Fisher en passant par Karl Pearson ou John Haldane, permettait de retrouver une forme de déterminisme global sur la base d’une variabilité sous-jacente continue. Mais cette solution consistait à adopter une position de surplomb pour définir les variables mesurées, c’est-à-dire ici une relation hiérarchique entre sélection et variation. Les valeurs suivies par les eugénistes étaient donc des critères de sélection donnés indépendamment des faits d’évolution qu’ils prétendaient corriger, ce qui dans le fond, revenait à abandonner le principe de réduction scientiste ou matérialiste à partir duquel ils prétendaient tirer la légitimité de leur action. C’est précisément ce que refusait Darwin qui tentait au contraire de proposer un processus naturel de développement des valeurs morales humaines. Il était donc impossible de trouver dans l’évolution une orientation qui aurait servi de critère pour guider l’action politique, qui plus est dans un sens contraire aux caractères qui comme la sympathie sont les produits de cette évolution.
Bien plus qu’un principe de progrès ou d’optimisation, la sélection naturelle était pour Darwin un principe d’exploration des possibles, de recherche d’adaptations inédites dans la prodigieuse diversité des formes vivantes.
Le conférencier
Charles Lenay, professeur de sciences cognitives et de philosophie des sciences, directeur puis directeur adjoint de l’équipe COSTECH (Connaissance, Organisation et systèmes Techniques) à l’Université de Technologie de Compiègne. Habilité à diriger les recherches en Philosophie (17e) et en Histoire des sciences (72e), ses premiers travaux concernent l’histoire de la biologie, essentiellement les théories de l’évolution et de l’hérédité. Ensuite, dans le contexte de l’UTC, il s’est consacré à l’étude de la constitutivité technique de l’expérience humaine (raisonnement, mémorisation, perception, interaction). Dans le cadre de recherches sur l’autonomie des personnes aveugles ou malvoyantes, il a mis en place un paradigme de recherche expérimentale sur les prothèses perceptives et a développé une forme d’internet tactile. Il travaille actuellement sur les conditions techniques des interactions perceptives et sur la constitution de valeurs émotionnelles partagées. Après avoir été vice-président de l’Association Française pour la Recherche Cognitive (ARCO), et avoir animé diverses équipes d’enseignement et de recherche, il a créé le GIS UTSH (Groupe d’Intérêt Scientifique, Unité des Technologies et des Sciences Humaines) avec les Universités de Technologie de Troyes et de Belfort-Montbeliard ainsi que l’école d’ingénieur UniLaSalle.
Références
Lenay, C. Darwin. Figures du savoir. Paris: Belles Lettres, 1999.
Drouin, J. M, et C. Lenay. Théories de l’évolution: une anthologie. Presses pocket, 1990.
Lenay, C. La Découverte des lois de l’hérédité (1862-1900): une anthologie. Presses pocket, 1990.
Lenay, C. « August Weismann ». In Encyclopédie Philosophique Universelle. Dictionnaire des Philosophes, 1 p. Paris: PUF, 1993.
Lenay, C. « Hugo De Vries: from the theory of intracellular pangenesis to the rediscovery of Mendel ». Comptes Rendus de l’Académie des Sciences-Series III-Sciences de la Vie 323, no 12 (2000): 1053‑60.
2/ Extraits :
Darwin se fait écho des idées de William Rathbone Greg et de son cousin Francis Galton :
« Chez les sauvages, les individus faibles de corps ou d’esprit sont promptement éliminés, et les survivants se font ordinairement remarquer par leur vigoureux état de santé. Quant à nous, hommes civilisés, nous faisons, au contraire, tous nos efforts pour arrêter la marche de l’élimination ; nous construisons des hôpitaux pour les idiots, les infirmes et les malades ; nous faisons des lois pour venir en aide aux indigents ; nos médecins déploient toute leur science pour prolonger autant que possible la vie de chacun. On a raison de croire que la vaccine a préservé des milliers d’individus qui, faibles de constitution, auraient autrefois succombé à la variole. Les membres débiles des sociétés civilisées peuvent donc se reproduire indéfiniment. Or, quiconque s’est occupé de la reproduction des animaux domestiques sait, à n’en pas douter, combien cette perpétuation des êtres débiles doit être nuisible à la race humaine. » (La descendance de l’homme, trad. E. Barbier, p. 144)
« Il en résulte que les membres insouciants, dégradés et souvent vicieux de la société, tendent à s’accroître dans une proportion plus rapide que ceux qui sont plus prudents et ordinairement plus sages. Voici ce que dit à ce sujet M. Greg : « L’Irlandais, malpropre, sans ambition, insouciant, multiplie comme un lapin ; l’Écossais, frugal, prévoyant, plein de respect pour lui-même, ambitieux, moraliste, rigide, spiritualiste, sagace et très intelligent, passe ses plus belles années dans la lutte et dans le célibat, se marie tard et ne laisse que peu de descendants…. Dans l’éternelle lutte pour l’existence, c’est la race inférieure et la moins favorisée qui aura prévalu, – et cela, non envertu de ses bonnes qualités, mais en vertu de ses défauts. » (La descendance de l’homme, p. 150)
Darwin contre l’eugénisme
« Notre instinct de sympathie nous pousse à secourir les malheureux ; la compassion est un des produits accidentels de cet instinct que nous avons acquis dans le principe, au même titre que les autres instincts sociables dont il fait partie. La sympathie, d’ailleurs, pour les causes que nous avons déjà indiquées, tend toujours à devenir plus large et plus universelle. Nous ne saurions restreindre notre sympathie, en admettant même que l’inflexible raison nous en fît une loi, sans porter préjudice à la plus noble partie de notre nature. »
« Nous devons donc subir, sans nous plaindre, les effets incontestablement mauvais qui résultent de la persistance et de la propagation des êtres débiles. » (La descendance de l’homme, p. 145)
Darwin contre l’idée de progrès :
« Nous sommes disposés, ainsi que l’a fait remarquer M. Bagehot, à considérer le progrès comme la règle normale de la société humaine ; mais l’histoire contredit cette hypothèse. Les anciens n’avaient pas plus l’idée du progrès que ne l’ont, de nos jours, les nations orientales. » (La descendance de l’homme, p. 143)
« Nous devons nous souvenir que le progrès n’est pas une règle invariable. (La descendance de l’homme, p. 152)
« Chacun admet que les hautes aptitudes intellectuelles sont avantageuses à une nation ; certains écrivains en ont conclu que les anciens Grecs, qui se sont, à quelques égards, élevés intellectuellement plus haut qu’aucune autre race, auraient dû, si la puissance de la sélection naturelle est réelle, s’élever encore plus haut sur l’échelle, augmenter en nombre et peupler toute l’Europe. Cette assertion découle de la supposition tacite si souvent faite à propos des conformations corporelles, c’est-à-dire de la prétendue tendance innée au développement continu de l’esprit et du corps. Mais toute espèce d’évolution progressive dépend du concours d’un grand nombre de circonstances favorables. La sélection naturelle n’agit jamais que d’une façon expérimentale. » (La descendance de l’homme, pp. 152-153)
Darwin Notebook. Idée de la séparation des espèces et de leur disparition… mais pas encore idée de sélection naturelle.
“I think
Case must be that one generation then should be as many living as now.
To do this & to have many species in same genus (as is) requires extinction.
Thus between A & B immense gap of relation. C & B the finest gradation, B & D rather greater distinction. Thus genera would be formed.— bearing relation to ancient types.— with several extinct forms for if each species an ancient (1) is capable of making 13 recent forms1, twelve of the contemporarys must have left no offspring at all2, so as to keep number of species constant.”— (Notebook B (07/1837-02/1838) : p.36)
Darwin. Lecture de Malthus
“Population is increase at geometrical ratio in far shorter time than 25 years — yet until the one sentence1 of Malthus no one clearly perceived the great check amongst men. — there is spring, like food used for other purposes as wheat for making brandy. — Even a few years plenty, makes population in Men increase & an ordinary crop causes a dearth. take Europe on an average every species must have same number killed year with year by hawks, by cold &c. — even one species of hawk decreasing in number must affect instantaneously all the rest. — The final cause of all this wedging, must be to sort out proper structure, & adapt it to changes. — to do that for form, which Malthus shows is the final effect (by means however of volition) of this populousness on the energy of man. One may say there is a force like a hundred thousand wedges trying force into every kind of adapted structure into the gaps of in the oeconomy of nature, or rather forming gaps by thrusting out weaker ones.”
(Notebook D , écrit le 23/09/1838)
Darwin. Analogie de la sélection artificielle :
“ It is a beautiful part of my theory, that domesticated races of organics are made by precisely same means as species — but latter far more perfectly & infinitely slower.” (Notebook E, p.71)
« Il est donc de la plus haute importance d’élucider quels sont les moyens de modification et de co-adaptation. Il m’a semblé, tout d’abord, probable que l’étude attentive des animaux domestiques et des plantes cultivées devait offrir le meilleur champ de recherche pour expliquer cet obscur problème. Je n’ai pas été désappointé [disappointed]; j’ai bientôt reconnu, en effet, que nos connaissances, quelque imparfaites qu’elles soient, sur la variation dans les conditions de domesticité, nous fournissent toujours l’explication la plus simple et la moins sujette à l’erreur [the best and safest clue]. Qu’il me soit donc permis d’ajouter que, dans ma conviction, ces études ont la plus grande importance et qu’elles sont ordinairement beaucoup trop négligées par les naturalistes. » (Introduction de l’Origine des espèces, pp. 3-4)
« J’ai donné à ce principe, en vertu duquel une variation si insignifiante qu’elle soit se conserve et se perpétue si elle est utile, le nom de sélection naturelle, pour indiquer les rapports de cette sélection avec celle que l’homme peut accomplir. » (Introduction de l’Origine des espèces, pp. 3-4)
Charles Naudin. Emploi finaliste de l’analogie de la sélection artificielle :
« Nous voulons, d’une espèce animale ou végétale, tirer une variété qui réponde à tel de nos besoins, et nous choisissons parmi le grand nombre des individus de cette espèce, pour en faire le point de départ d’une nouvelle lignée, ceux qui nous paraissent s’écarter déjà du type spécifique dans le sens qui nous convient, et, par un triage rationnel et suivi des produits obtenus, nous arrivons, au bout d’un nombre indéterminé de générations, à créer des variétés ou espèces artificielles qui répondent plus ou moins bien au type idéal que nous nous étions formés, et qui transmettent d’autant mieux à leurs descendants les caractères acquis que nos efforts ont porté sur un plus grand nombre de générations. Telle est, dans nos idées, la marche de la nature ; comme nous, elle a voulu former des races pour les approprier à ses besoins ; et avec un nombre relativement petit de types primordiaux, elle a fait naître successivement, et à des époques diverses, toutes les espèces végétales et animales qui peuplent le globe. »
(Naudin (Ch.), « Considérations philosophiques sur l’espèce et la variété » Revue Horticole, 1852, pp. 102-109)
Clémence Royer :
« Si l’effet des conditions de vie se confond avec celui de la sélection naturelle, c’est peut-être qu’au fond ils ont l’un ou l’autre une cause première identique, qui agit seulement d’une manière plus ou moins directe, et à l’aide d’une série plus ou moins longue de causes secondaires. » »
(Charles Darwin, de l’origine des espèces par sélection naturelle ou des lois de transformation des êtres organisés, trad. Clémence Royer, 3e éd., Paris, 1870, p.164)
Darwin. Fonctionnement de l’analogie avec les animaux de fantaisie :
« Mais lorsque je lui demande [à Asa Gray] s’il regarde comme voulue par la Providence, pour l’amusement de l’homme, chaque variation du biset, duquel l’homme a fait, par accumulation de croisements, un grosse gorge ou un pigeon paon, il ne sait que me répondre; et s’il admet, lui ou quelque autre, que ces variations sont accidentelles en ce qui concerne le but (naturellement, ce n’est pas accidentel en ce qui concerne la cause ou l’origine), alors je ne vois aucunement pourquoi il considérerait comme préconçues les variations accumulées par lesquelles a été formé le pivert, si admirablement adapté. »
(Darwin (Ch.), lettre à Mme Wedgwood, du 11 juillet 1861)
« Personne, par exemple, n’aurait jamais essayé de produire un pigeon-paon, avant d’avoir vu un pigeon dont la queue offrait un développement quelque peu inusité ; personne n’aurait cherché à produire un pigeon Grosse‑ gorge, avant d’avoir remarqué une dilatation exceptionnelle du jabot chez un de ces oiseaux ; … »
(Darwin (Ch.), Origine des espèces, op. cit., p. 38.)
Sir John Herschel. Problème du hasard :
» We can no more accept the principle of arbitrary and casual variation and natural selection as a sufficient account, per se, of the past and present organic world, than we can receive the Laputan method of composing books (pushed a l’outrance) as a sufficient one of Shakespeare and the Principia. »
(Sir John Herschel, Physical Geography of the Globe, édition de 1861, note de bas de page, p. 12 sic.)
Naudin. Création par évolution déterminée :
« Le plus simple examen eût cependant suffit pour faire reconnaître que la théorie évolutive, aussi bien que le principe de continuité dont elle découle, reste strictement neutre entre l’athéisme et la croyance à un Pouvoir créateur. Dieu pouvait faire le monde d’un nombre infini de manière, et il est tout à fait indiffèrent à la théologie qu’il l’ait créé d’un coup, sans intervention de causes secondes, ou par la voie plus lente de l’évolution et de l’enchaînement des phénomènes. »
(Naudin (Ch.), « Les espèces affines et la théorie de l’évolution », Bull. Soc. bot. de France, t. XXI, séance du 13 novembre 1874, tiré à part, MUS[BB 22M.1874, pp. 16-17)
Darwin. Sympathie comme instinct social
“… social instincts, which as I hope to show is probably the foundation of all that is most beautiful in the moral sentiments of the animated beings” (Notebook E p.48-49)
« Mais il faut toujours se rappeler que la puissance de l’opinion publique dépend du cas que nous faisons de l’approbation ou du blâme exprimé par nos semblables, ce qui dépend de notre sympathie que, l’on n’en peut guère douter, la sélection naturelle a primitivement développée, car elle constitue un des éléments les plus importants des instincts sociaux. (La descendance de l’homme, p. 155)
Personne ne peut contester l’importance qu’ont, pour les animaux inférieurs, ces diverses qualités sociales ; or il est probable que, de même que les animaux, les ancêtres de l’homme en sont redevables à la sélection naturelle jointe à l’habitude héréditaire. Lorsque deux tribus d’hommes primitifs, habitant un même pays, entraient en rivalité, il n’est pas douteux que, toutes autres circonstances étant égales, celle qui refermait un plus grand nombre de membres courageux, à s’entr’aider et à se défendre mutuellement, ait dû réussir plus complètement et l’emporter sur l’autre. (La descendance de l’homme, p. 140)
Darwin. Origine de la sympathie
« A mesure que l’homme avance en civilisation et que les petites tribus se réunissent en communautés plus nombreuses, la simple raison indique à chaque individu qu’il doit étendre ses instincts sociaux et sa sympathie à tous les membres de la même nation, bien qu’ils ne lui soient pas personnellement connus. Ce point atteint, une barrière artificielle seule peut empêcher ses sympathies de s’étendre à tous les hommes de toutes les nations et de toutes les races. L’expérience nous prouve, malheureusement, combien il faut de temps avant que nous considérions comme nos semblables les hommes qui diffèrent considérablement de nous par leur aspect extérieur et par leurs coutumes. La sympathie étendue en dehors des bornes de l’humanité, c’est-à-dire la compassion envers les animaux, paraît être une des dernières acquisitions morales. Elle est inconnue chez les sauvages, sauf pour leurs animaux favoris. Les abominables combats de gladiateurs montrent combien peu les anciens Romains en avaient le sentiment. Autant que j’ai pu en juger, l’idée d’humanité est inconnue à la plupart des Gauchos des Pampas. Cette qualité, une des plus nobles dont l’homme soit doué, semble provenir incidemment de ce que nos sympathies, devenant plus délicates à mesure qu’elles s’étendent davantage, finissent par s’appliquer à tous les êtres vivants. Cette vertu, une fois honorée et cultivée par quelques hommes, se répand chez les jeunes gens par l’instruction et par l’exemple, et finit par faire partie de l’opinion publique. » (La descendance de l’homme, p. 132)
« Le désir d’aider les membres de leur communauté d’une manière générale, mais, plus ordinairement, le désir de réaliser certains actes définis, entraîne les animaux sociables. L’homme obéit à ce même désir général d’aider ses semblables, mais il n’a que peu ou point d’instincts spéciaux. Il diffère aussi des animaux inférieurs, en ce qu’il peut exprimer ses désirs par des paroles qui deviennent l’intermédiaire entre l’aide requise et accordée. Le motif qui le porte à secourir ses semblables se trouve aussi fort modifié chez l’homme ; ce n’est plus seulement un impulsion instinctive aveugle, c’est une impulsion que vient fortement influencer la louange ou le blâme de ses semblables. L’appréciation de la louange et du blâme, ainsi que leur dispensation, repose sur la sympathie, sentiment qui, ainsi que nous l’avons vu, est un des éléments les plus importants des instincts sociaux. » (La descendance de l’homme, p. 669)
Bibliographie personnelle sur l’histoire de la biologie de l’évolution
Lenay, C. Darwin. Figures du savoir. Paris : Belles Lettres, 1999.
Drouin, J. M, et C. Lenay. Théories de l’évolution : une anthologie. Presses pocket, 1990.
Lenay, C. La Découverte des lois de l’hérédité (1862-1900): une anthologie. Presses pocket, 1990.
Lenay, C. « August Weismann ». In Encyclopédie Philosophique Universelle. Dictionnaire des Philosophes, 1 p. Paris : PUF, 1993.
Lenay, C. « Hugo De Vries: from the theory of intracellular pangenesis to the rediscovery of Mendel ». Comptes Rendus de l’Académie des Sciences-Series III-Sciences de la Vie 323, no 12 (2000): 1053‑60.
Lenay, C. « Caractères adaptatifs et représentations symboliques ». Intellectica 16 (1993): 209‑57.
Lenay, C. « Mendel, en son Jardin ». Les Cahiers de Science & Vie, juin 1993.
Lenay, C. « Francis Galton : inné et acquis chez les grands hommes de la Société Royale de Londres ». Bulletins et Mémoires de la Société d’anthropologie de Paris 6, no 1 (1994): 135‑50.
Lenay, C. « Préhistoire de la génétique : Hugo de Vries et l’idée d’indépendance des caractères ». Nature, histoire, société : essais en hommage à Jacques Roger, 1995, 133.
Lenay, C. « Auguste Weismann ; Karl von Naegeli ; Hugo de Vries ; Francis Galton ; Gregor Mendel ». In Dictionnaire du Darwinisme et de l’évolution. Paris : PUF, 1996.
Lenay, C. « Sélection artificielle et sélection naturelle : normes biologiques et techniques génétique ». In Le génome et son double, édité par Gérard Hubert, 55‑69. Paris : Hermès, 1996.
Lenay, C. « Yves Delage : évolution et hérédité d’un point de vue néo-lamarckien ». In Jean-Baptiste Lamarck 1744-1829, G. Laurent., 587‑98. Paris : Editions du CTHS, 1997.
Lenay, C. « Plasma Germinatif ». In Dictionnaire d’histoire et philosophie des sciences, 12 p. Paris : PUF, 1998.
Lenay, C. « Théorie et techniques de l’évolution : la question d’une éthique naturelle ». In La Vie, Une Enigme : Le génome humain en devenir, G. Teboul (Ed.)., 53‑74. Paris : LPM, 2000.
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